Rien ne peut se comparer. Qu'est-ce qui n'est pas entièrement
seul avec soi, en effet, et y eut-il jamais chose à dire ;
nous ne nommons rien, il nous est seulement permis d'endurer
et de nous persuader que çà et là un éclat,
çà et là un regard nous a peut-être effleurés
comme si précisément cela qui est notre vie
vivait à l'intérieur. A qui résiste,
le monde n'advient pas. Et à qui comprend trop,
l'éternel se dérobe. Parfois
dans de grandes nuits pareilles à celle-ci nous sommes comme
hors de danger, partagés en fragments égaux,
répartis en étoiles. Comme elles sont pressantes
Rainer Maria Rilke
Poèmes à la nuit, Parcours nocturne (p 75)
Editions Verdier 11220 Lagrasse 1994